Arkea Ultim Challenge – Brest : comment les teams se sont préparés à ce premier tour du monde en Ultim ? guillaume, 6 mars 202427 juin 2024 Combien de temps avant le départ les teams sont-ils passés en mode tour du monde en solitaire ? Comment se sont-ils organisés en amont et pendant la course afin que les skippers puissent aborder au mieux ce premier tour du monde de la classe Ultim ? Ces questions, Antoine Le Ster, de SVR-Lazartigue, Christophe Boutet, d’Adagio, et Sandrine Bertho, d’Actual Leader, y ont répondu lors d’une table ronde en marge du départ de la course à Brest. L’intégralité de la table ronde est à retrouver dans cet article. Des degrés d’agitation différents durant les préparations À l’heure où nous rédigeons ces lignes, la première édition de l’Arkea Ultim Challenge-Brest est déjà bien entamée. Mais on ne s’apprête pas à parcourir pas les mers du monde sans un minimum de préparation. Encore moins lorsqu’il s’agit de la première course autour du globe d’une classe. Trois responsables d’équipes présentes au départ de Brest ont dévoilé quelques éléments de contexte pour comprendre la manière d’aborder ce tour du monde. Chez Adagio, on a mis en place un mode commando seulement quelques mois avant le départ. “La validation du partenariat avec le sponsor s’est faite début septembre 2023 et nous avons dû nous mettre en marche forcée. Nous avions récupéré un navire qui n’avait pas navigué depuis la Route du Rhum. Nous devions essayer d’être efficients et prioriser. Nous avons donc divisé le projet en quatre pôles : technique, avec Loïc Le Mignon à sa tête et qui nous a fait gagner du temps grâce à sa connaissance du bateau, partenariat, communication et hospitalité”, retrace Christophe Boutet, chef de projet. Même son de cloche chez SVR-Lazartigue, malgré un rétroplanning enclenché au lendemain de la Route du Rhum. La faute à une Transat Jacques-Vabre qui a laissé des traces à l’automne. “Au retour de la Route du Rhum à Concarneau, nous avions eu un foil cassé, dont la réparation a mis un petit coup dans le planning d’entraînements prévus en mai et juin et à l’issue de la Jacques-Vabre, nous avons eu la mauvaise surprise de découvrir une fissure dans le bras avant du bateau, relate Antoine Le Ster, responsable partenariats chez MerConcept. Il y a eu une émulation avec l’ensemble des équipes de Merconcept, mais aussi chez CDK, GSea Design et VPLP pour tenter de trouver une solution afin d’effectuer les réparations dans les temps très contraints. Le maître mot de cette préparation, c’est vraiment adaptabilité.” Sandrine Bertho, directrice de projet chez Actual Leader, exclut le terme calme pour qualifier la préparation du team à cet Arkea Ultim Challenge. La faute à des avaries majeures sur les appendices, survenues pendant l’année, sur des foils et sur une dérive lors de la Transat Jacques-Vabre. En revanche, elle se satisfait que l’équipe soit “arrivée au niveau de préparation souhaité avant la Jacques-Vabre. Hormis les révisions et les changements de pièces sur le navire, nous avons réussi à gérer ces casses majeures, même si nous avons dû passer en 2-8, 7 jours sur 7, contrairement à notre organisation habituelle en 5 jours sur 7.” Lire aussi : Arkea Ultim Challenge-Brest : quels moyens mis en œuvre pour garantir la sécurité ? Des escales à anticiper Course uniquement dédiée à la classe Ultim, comme son nom l’atteste, l’Arkea Ultim Challenge s’est intercalée dans le calendrier juste après une transatlantique, fait assez rare dans la course au large. Cette particularité s’accompagne également de la possibilité pour les équipes d’effectuer des escales techniques dans des ports soumises à l’obligation de rester immobilisé durant 24 h. Durant ce laps de temps, les équipes ont tout loisir pour amener du matériel et de la main-d’œuvre sur place afin d’intervenir sur les navires. “Cela suppose un énorme travail d’anticipation pour nous, afin que toutes les situations que nous avons prévues puissent être déclenchées facilement”, indique Sandrine Bertho. “Ce paramètre a été totalement pris en compte lors de la préparation, prolonge Antoine Le Ster. Nous avions eu un bel exemple en 2019, avec cette Brest Atlantique. Nous avions dû amener un safran à Rio, faire une escale au Cap. Donc c’est aussi en partant de cette expérience qu’on s’est dit qu’il fallait anticiper. Cela implique d’avoir la caisse en bois qui va contenir le safran ou autre pièce, avoir des contacts dans les différentes ambassades des lieux dans lequel on va potentiellement s’arrêter, sélectionner les ports les plus faciles d’accès, essayer d’avoir 2 ou 3 contacts là-bas qui peuvent intervenir rapidement. En tout cas tout est anticipé, du transport de matériel aux passeports des équipes.” Choix des ports, choix des lignes aériennes à privilégier… L’ensemble des paramètres ont été étudiés en amont de la course. “Nous avons pensé aux différents objets à transporter, à leur volume, au type d’avion pour le transport, aux endroits où il était facile de faire transiter le matériel et de voir comment approcher le plus facilement le bateau dans les lieux prédéfinis”, énumère Sandrine Bertho. Lire aussi : À quoi pourrait ressembler l’Ultim du futur ? Organisation pendant la course Cette question d’anticipation a notamment permis à SVR-Lazartigue de se montrer réactif après l’avarie majeure subie par Tom Laperche. Le team avait réparti ses effectifs en deux groupes distincts. Un dédié au routage réuni autour de Jean-Yves Bernot et intégrant François Gabart, Corentin Nouguet et Charlie Dalin un autre focalisé sur la partie technique, “qui intègre plus de monde, dont le boat captain Frédéric Bérat”. Malheureusement pour le benjamin de l’épreuve et malgré tous les efforts fournis au port du Cap, une réparation express du navire s’est avérée impossible à réaliser pour pouvoir repartir vers l’océan Indien. Même répartition du côté d’Actual, qui a aussi connu des déboires mais été plus heureux car Anthony Marchand a pu repartir après avoir subi une avarie sur un foil qui a été retiré à Cape Town. “Nous avons établi la partie météorologie avec Christian Dumard à Auray, précise Sandrine Bertho. Il est accompagné d’Yves Le Blevec et de Thierry Chabagny. Une autre partie est dédiée à la partie technique. Nous avons aussi mobilisé des personnes afin d’être joignable 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 pour pouvoir, à notre demande, envisager, par exemple, des scénarios de réparation sur le bateau.” Après l’opération mise à l’eau d’Adagio gourmande en énergie au sein du team, le choix a été fait de “diviser la charge tout en ne modifiant pas forcément complètement le travail hebdomadaire. Nous restons avec un une cellule qui fonctionne du lundi au vendredi sur les heures ouvrées classiques.” Concernant le routage, Christophe Boutet se targue de compter sur un skipper “figariste dans l’âme qui prend ses propres décisions et détermine ses propres routages. Il y a tout de même un accompagnement avec notre météorologue David Lanier. L’équipe est ensuite présente sur les volets sécurité et psychologique pour Eric la semaine et tout le reste de l’équipe sera en veille les nuits et les week-ends.” Crédit photo : © Thierry Martinez | Team Actual Voile de compétition arkea ultim challenge brest