Sailing Café 6 : les jumeaux numériques dans la voile et le transport maritime audrey, 17 octobre 202417 octobre 2024 Pour son sixième Sailing Café, organisé le 10 octobre, Bretagne Développement Innovation a réuni un trio d’ingénieurs pour échanger autour des jumeaux numériques : Sylvain Faguet, directeur commercial de D-ICE Engineering, dont les systèmes d’optimisation de pilotage sont notamment présents à bord des cargos à voile Canopée et Neoline ; Pierre Monfort, directeur de l’unité d’affaires performance navires au sein d’OSE Engineering, qui développe des outils digitaux au service du milieu maritime ; et Xavier Guisnel, coordinateur de l’ingénierie au sein du cabinet d’architecture navale VPLP Design. En guise d’introduction, il peut être opportun d’expliciter le terme, venu de l’industrie, de jumeau numérique. Pierre Monfort le définit comme “la représentation numérique d’un système physique” sur lequel, précise Xavier Guisnel, “on peut mettre le focus plutôt sur la performance, la structure ou la chaîne énergétique”. Le tout est utilisé “pour comprendre comment se comporte le navire en conditions réelles”, complète Sylvain Faguet. Les VPP (programmes de prédiction de vitesse), qui servent au routage, en sont le modèle le plus connu mais “avec l’augmentation constante de la puissance de calcul, on s’approche chaque jour un peu plus d’un véritable jumeau numérique du système réel”, développe Pierre Monfort. S’il permet d’obtenir des réponses et de prédire des comportements, tous nos experts s’accordent à dire que le jumeau parfait “reste encore une utopie”, dixit Pierre Monfort. Sylvain Faguet confirme que si “en modélisation 3D” on s’en approche vraiment”, sur le comportement dynamique, c’est plus compliqué. “Mais on y travaille !” sourit Xavier Guisnel. Le champ d’application de ces jumeaux numériques est en tout cas immense et les exemples concrets ne manquent pas. Chez D-ICE Engineering, “le jumeau numérique est au cœur de notre système, qui calcule la meilleure route en fonction des vagues, du vent, des contraintes opérationnelles et de la consommation, explique Sylvain Faguet. Or le jumeau numérique est nourri de différents modèles que l’on assemble : résistance à l’avancement, fardage, poussée vélique, chaîne propulsive…” Même logique pour Pierre Monfort sur le projet MerVent de porte-conteneurs à voiles, pour lequel OSE Engineering développe “un logiciel d’optimisation énergétique dont les recommandations données à l’équipage sont basées sur le jumeau numérique”. Xavier Guisnel précise quant à lui qu’il peut y avoir “plusieurs jumeaux numériques pour un même navire selon le sujet que l’on traite, comportement dynamique ou performance”, par exemple, et que l’on peut y “plugger des systèmes comme le pilote automatique pour s’approcher le plus possible du réel”. Inversement, le jumeau numérique se nourrit aussi du réel, Pierre Monfort poussant ses clients à équiper leurs navires de capteurs “pour recueillir des données et alimenter le jumeau numérique qui va ainsi se préciser au cours de la vie du navire”. Chez VPLP Design, on reste d’ailleurs très attentif car le système réel évoluant, il est impératif de “bien communiquer pour garder une gémellité parfaite”. Certains angles morts restent cependant difficiles à éclairer, tel le niveau de propreté d’une coque, notamment dans le shipping. “Le décalage peut aussi venir d’un défaut de fabrication ou de fonctionnement d’un moteur”, ajoute Sylvain Faguet, sans parler, bien sûr, du facteur humain. A quand un jumeau numérique du skipper couplé à celui de son bateau ? C’est l’un des enjeux à venir, surtout en course au large quand, dans le shipping, la grande révolution est attendue autour de l’automatisation. Pierre Monfort imagine bien “un commandant supervisant 5 navires à distance”. Avec l’intelligence artificielle, “déjà un de nos outils dans le traitement de ces gros volumes de données” selon Sylvain Faguet, “la possibilité d’allers-retours constants entre le jumeau numérique et le système réel devrait permettre d’enrichir formidablement les deux modèles”, explique Xavier Guisnel. In fine, le jumeau numérique devient chaque jour un peu plus “une opportunité pour le client final de diminuer ses coûts dans le shipping ou augmenter la performance d’un bateau de course”, conclut Pierre Monfort. Propulsion vélique Voile de compétition