2024 : Décollage attendu pour la filière vélique en Bretagne Arnaud C., 10 janvier 202427 juin 2024 Mise à l’eau de nouveaux cargos-voiliers pour Towt et Grain de Sail, lancement de la construction d’un navire vélique pour Windcoop, ouverture de l’usine Solidsail Mast Factory… 2024 marque la concrétisation de nombreux projets liés à la décarbonation du transport maritime sur le territoire breton et un engagement de la Région encore plus accru sur le sujet. Décryptage. Livre blanc Wind Ship Étude sur la filière en Bretagne Annuaire de la filièreen Bretagne Déjà bien engagée sur le chemin de la décarbonation du transport maritime, la Bretagne entend intensifier cette dynamique avec le transport à la voile et contribuer avec la création d’une véritable filière industrielle en lien et en soutien aux travaux de l’association Wind Ship au niveau national. Forte d’un tissu d’acteurs très impliqués sur le sujet, et de la volonté de décarboner le transport maritime, la Région Bretagne a voté le 15 décembre 2023 une feuille de route pour faire du transport vélique l’un des piliers de la transition maritime. Il revient à Bretagne Développement Innovation d’animer la partie filière industrielle en accompagnant les projets innovants et en fédérant ses acteurs pour développer des projets coopératifs et des créations d’emplois. Soutenue par la Région, la société Solidsail Mast Factory est ainsi un bel exemple de collaboration entre plusieurs acteurs phares de la Bretagne Sailing Valley. Cinq entreprises bretonnes (Avel Robotics, Lorima, CDK Technologies, SMM et Multiplast) se sont associées aux Chantiers de l’Atlantique pour créer une usine de production de mâts destinés au transport de marchandises ou de passagers à la voile. Les travaux ont commencé en ce mois de décembre sur le site du Rohu, à Lanester, pour une mise en service au dernier trimestre 2024. Le territoire breton voit également fleurir plusieurs projets de cargos-voiliers innovants. Le 11 janvier, le chocolatier et armateur Grain de Sail a inauguré ainsi à Saint-Malo son nouveau cargo-voilier conçu par trois entreprises bretonnes, le cabinet d’architecture L2O Naval, Lorima pour la fabrication et l’installation des mâts à Lorient, ainsi que les chantiers Piriou pour la construction. Long de 52 mètres, Grain de Sail 2 est doté d’une capacité de chargement de 350 tonnes, contre 24 m et 50 tonnes pour son prédécesseur, qui avait été mis à l’eau en 2020 et sera désormais affecté à du cabotage européen. “Cela va nous permettre de transporter la totalité de nos matières premières (café et cacao) et de faire de la prestation de transport pour le compte de clients externes”, explique Stefan Gallard, directeur marketing de Grain de Sail. Equipé de 1 500 m2 de voilure, cette goélette en aluminium sera également plus rapide : environ 11-12 nœuds de moyenne pour une traversée de l’Atlantique d’une durée de 15 à 18 jours. “Une performance qui nous permettra de réaliser, en partance de Saint-Malo, trois à quatre boucles transatlantiques par an, contre deux actuellement, avec une réduction carbone de 95% par rapport à un porte-conteneurs classique”, ajoute Stefan Gallard. La première rotation est prévue fin janvier, direction New York. D’ici 2026, la compagnie maritime Towt, qui s’est développée à Douarnenez avant de déménager au Havre, bénéficiera quant à elle d’une flotte de quatre nouveaux voiliers cargos, également construits par les chantiers Piriou. Deux de ces navires d’une capacité de chargement de 1 100 tonnes seront mis en service l’an prochain, le premier est actuellement visible sur le port de Concarneau. Sur tous les fronts, Piriou à Concarneau a aussi été missionné par Windcoop pour la construction, à partir du printemps 2024, d’un cargo-voilier de 85 mètres doté d’une capacité de chargement de 1 400 tonnes, propulsé en grande partie par 1 500 m2 de voilure, ce qui permet d’économiser jusqu’à 90% de carburant. Fruit de la coopération entre deux entreprises, Zéphyr & Borée – compagnie maritime lorientaise experte dans la conception et la gestion de cargos à voile – et Arcadie – importateur d’épices bio -, Windcoop prévoit de mettre en service ce voilier-cargo en 2026 sur des rotations Marseille-Madagascar. Né sous un format coopératif impulsé par Julien Noé, président d’Enercoop et fondateur de plusieurs coopératives, ce projet “avait pour pari d’être financé par le maximum de citoyens possible, explique Nils Joyeux, directeur général de Windcoop et président de Zéphyr & Borée. Le pari est réussi puisque la coopérative a réalisé une levée de fonds d’un peu plus de 6 millions d’euros auprès de 1 200 sociétaires, lui permettant ainsi de financer le bateau à 100%.” À terme, Windcoop souhaite élargir sa flotte et ouvrir d’autres lignes à destination de l’Amérique du Sud et de l’Amérique centrale. Grâce à ce modèle coopératif, n’importe qui a la possibilité de devenir sociétaire de l’entreprise et intégrer la gouvernance d’une société qui décarbone le transport de marchandises grâce à l’énergie du vent. Forte de ce dynamisme autour du fret à la voile, la Région Bretagne souhaite aller encore plus loin sur le sujet. C’est en ce sens qu’elle a missionné la compagnie Zéphy & Borée pour la réalisation d’une étude sur le cabotage au niveau régional et européen. “Notre première mission est de dresser un bilan de la flotte existante, explique Nils Joyeux. Nous allons également étudier les flux de marchandises et échanger avec différents acteurs pour comprendre quels seraient les différents mécanismes qui permettraient de rendre viable – d’un point de vue économique, logistique et écologique – le cabotage à la voile” entre les ports bretons et plus largement vers le Royaume-Uni et l’Irlande. Enfin, la Région prévoit également d’évaluer le potentiel qu’offrirait le transport vélique pour les liaisons vers les îles. Crédit photo : © Emmanuel Duclos / EasyRide – Grain de Sail Propulsion vélique